Camargue embouteilleur

Quand le vin BIO se révèle en Occitanie

« Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. »

Antoine de Saint-Exupéry

Le vin bio a le vent en poupe cette dernière décennie avec une production multipliée par quatre. “Aujourd’hui, plus de 25 000 hectares de vignes sont conduites en bio soit 9 % du vignoble régional*”. A l’origine, les vignerons indépendants se mettaient à la viticulture biologique par conviction personnelle. Aujourd’hui, c’est une demande qui explose auprès des jeunes consommateurs qui souhaitent consommer moins mais de meilleure qualité.

Au cœur de l’Occitanie, terre de vins biologiques, tout l’enjeu est d’allier production d’un raisin biologique et réalisation d’un vin bio, allant parfois même jusqu’au développement d’une viticulture en Bio-dynamie. Ces vins bio en sont d’autant plus fragiles et leur manipulation devient plus exigeante, ce qui impacte sur leur mise en bouteille. Mais alors, embouteillage mobile et vin bio/biodynamique : est-ce possible ?

Occitanie : terre de vins biologiques

L’Occitanie, notamment l’ex-Languedoc-Roussillon, reste le chef de file en France dans la production du vin bio. Elle détient la plus grande exploitation de vin et de vin bio en France. Déjà sous l’Empire romain, les premiers vignobles se tenaient de l’Aude à l’Hérault en passant par le Gard.  Au fil des époques, la viticulture a évolué, entraînant l’utilisation abusive de pesticides et d’engrais chimiques afin d’intensifier les productions pour répondre à la demande toujours croissante des consommateurs. Une pratique qui a fait les beaux jours de l’économie française sans pour autant se préoccuper de la santé publique. En conséquence, les ceps se sont modifiés, la pollution des sols s’est intensifiée et une recrudescence des cancers chez les viticulteurs est apparue. Contre ce fléau, certains vignerons languedociens et gardois ont commencé dans les années 1980 à repenser leur viticulture. L’objectif était de faire interagir positivement sol, plante et climat afin de retrouver des vignes saines. Cela pouvait être aussi un moyen de s’engager pour la protection de l’environnement.

Aujourd’hui bien plus qu’une niche, le vin bio fait de plus en plus d’adeptes dans le monde entier. D’une part, du côté des vignerons qui reconnaissent la qualité du produit et la valorisation du terroir. D’autre part des clients avertis, attentifs à ce qu’ils consomment et qui constituent un marché en forte progression.

Viticulture biologique : étapes et enjeux

Le vin commercialisé en appellation « bio» représente les deux tiers de tous les produits français « bio » exportés. Depuis le 1er août 2012, la vinification est aussi contrôlée et les vins peuvent être certifiés « biologiques ». Auparavant, seuls les raisins étaient contrôlés, les vins étaient alors certifiés « vin issu de raisin de l’agriculture biologique ».

Afin d’obtenir cette certification, il faut d’abord passer par une phase de conversion de la vigne qui dure trois ans. Une contrainte pour les petits vignerons qui ne voient pas leurs efforts récompensés rapidement. Pendant la conversion, les viticulteurs doivent revoir les techniques de gestion des sols, l’entretien des vignes et les procédés de vinification. Ces opérations longues et coûteuses peuvent être un frein pour franchir le pas entre le conventionnel et le biologique.

Production d’un raisin biologique

Pour obtenir l’appellation Bio, la production de raisins biologiques doit suivre un cahier des charges strict. Il stipule l’exclusion de molécules organiques de synthèse (pesticides, herbicides), les engrais chimiques ou l’usage d’OGM pour traiter les vignes. Ces dernières doivent être cultivées grâce à un travail mécanique du sol (limiter le phénomène de compaction) et à des engrais d’origine naturelle (organique type compost ou minéral type poudre de roche) pour renforcer au maximum leurs défenses naturelles. L’objectif est de privilégier la vie des sols et de favoriser l’écosystème naturel.

Les moyens de lutte contre les maladies sont très limités en agriculture biologique, il faut systématiquement utiliser toutes les méthodes préventives possibles. Néanmoins, face à certaines maladies virulentes, les vignerons biologiques ont le droit de recourir à certains fongicides comme le soufre, le cuivre et la bouillie bordelaise. Une pratique pour le moins controversée par les plus engagés. Dernière en date, l’apparition du “Mildiou” au printemps 2018, a nécessité un traitement sur les vignes biologiques fragilisées.

En outre, produire du raisin issu de l’agriculture biologique est plus coûteux que la vigne conventionnelle. En effet, le vin certifié Bio nécessite jusqu’à 30 % de main d’œuvre supplémentaire. Un investissement humain qui justifie notamment le prix de vente souvent plus élevé des vins biologiques. Malgré ce pari sur l’avenir, certains vignerons se découragent quant à la période de conversion trop longue. Jusqu’en 2018, sans la certification Bio, il n’était pas possible d’augmenter le prix de son vin. Une injustice, selon eux, qui s’est vue palliée grâce à la nouvelle certification “en conversion vers le bio”.

Production d’un vin biologique

Depuis 2012, un vin peut être certifié « bio ». Pour cela, les procédés de vinification doivent respecter un cahier des charges rigoureux. Le vin doit être produit à partir d’un assemblage d’ingrédients issus de l’agriculture biologique exclusivement. L’utilisation d’additifs œnologiques (intrants) est réglementée par une liste stricte de produits autorisés d’origine naturelle. Certains procédés physiques de traitement sont interdits notamment l’électrodialyse, la désalcoolisation, ou l’élimination du SO2 (sulfites). Le vin ne doit pas bénéficier d’un traitement thermique supérieur à 70°. Sa filtration ne doit pas être inférieure à 0,2 m. Enfin, et pas des moindres, le taux de SO2 total ne doit pas excéder des valeurs spécifiques réglementaires.

Bio-dynamie

La bio-dynamie est une filière de production qui se démarque de celle du Bio tout en lui étant complémentaire. En effet, la certification Bio est requise pour l’obtention de celle en bio-dynamie. Cette dernière est complexe et exige quatre ans de conversion. Il existe actuellement deux labels : « Bio-dynamique » certifié par l’organisme Demeter et « Biodyvin » certifié par Ecocert.

L’intérêt principal de la bio-dynamie est de tenir compte de l’influence des forces célestes (lunaires notamment) et terrestres dans la production du raisin et dans la vinification. Le domaine viticole doit être en mesure de produire en autonomie en utilisant toutes ses ressources disponibles en interaction (animaux, végétaux, main d’œuvre humaine, terroir). Ceci s’intègre dans une dimension d’équilibre écologique. Cette philosophie de viticulture très exigeante demande une implication totale. La bio-dynamie connaît à ce jour un succès grandissant même auprès des grands vignobles (champagne Roederer, vin Romanée-Conti) notamment grâce à son impact environnemental et au résultat gustatif.

Embouteillage mobile et vin biologique/bio-dynamique : est-ce possible ?

De par leur cahier des charges exigeant, les vins biologiques et bio-dynamiques présentent un taux réduit en sulfites. Ces derniers sont pourtant essentiels pour contrôler la fermentation et stabiliser le vin. Ceci est d’autant plus vrai avec les vins rosés et les vins blancs car ils sont plus sensibles à l’oxydation que les vins rouges. Le soufre assure la conservation et le maintien de la qualité du vin lors de la mise en bouteille. Par conséquent, les vins biologiques et bio-dynamiques sont plus fragiles et doivent faire l’objet d’une démarche rigoureuse lors de l’embouteillage.

Un véritable enjeu pour les embouteilleurs. En effet, il est possible d’améliorer les conditions de mise en bouteille après une vinification bio. Pour y parvenir, Il est intéressant de faire appel à un embouteilleur mobile car cela permet au vigneron de se consacrer davantage à la culture et à la vinification tout en étant sûr de bénéficier de moyens techniques modernes de mise en bouteille. Pour une opération de mise en bouteille d’un vin vinifié bio, l’équipement doit pouvoir maîtriser les milieux microbiologiques. Pour cela, il est impératif de pouvoir stériliser quotidiennement la ligne d’embouteillage avec, par exemple, un système combiné d’une filtration de type membrane et d’une chaudière de stérilisation. Des procédures de contrôle rigoureuses sont nécessaires lors des stérilisations chimiques afin d’éviter la contamination du vin. En parallèle, l’inertage au gaz (azote ou CO2) de l’ensemble du matériel permet de minimiser l’apport en oxygène des vins lors de leur mise en bouteille. Enfin, l’ajout de stabilisants après la filtration finale doit être impérativement réalisé avec des gommes certifiées bio.

L’embouteillage mobile des vins biologiques et bio-dynamiques est donc possible mais vignerons et embouteilleurs doivent avoir les bons réflexes et les équipements adaptés.

*Source: Patrick Guiraud, président de l’association Sudvinbio pour le Midilibre – 30/01/2018 : https://www.midilibre.fr/2018/01/29/l-occitanie-en-pointe-sur-le-vin-bio,1620263.php


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